« Ils m’ont diffamé. J’aurai besoin qu’ils viennent devant les autorités, prouver comment je suis voleur … »
Il est le chef du village Bwadibo, petite bourgade située dans l’arrondissement de Dibombari et qui partage une ligne de frontière avec le village Bonjongo de Douala 4ème. Il y règne en ce moment une grosse tension provoquée par un groupe de jeunes qui font grand bruit. Ils viennent d’organiser une marche, non autorisée par le sous-préfet. Les organisateurs accusent le chef d’avoir dilapidé toutes les richesses du village, notamment les terres, les fruits de la carrière et les recettes générées par le marché, en complicité disent-ils avec le sous-préfet. Des accusations aussi graves qui ont fait le tour des médias. Compte tenu de la gravité de la situation, nous nous sommes rendus à la chefferie pour avoir la version du chef qui n’avait été prise en compte par certains de nos confrères qui ont relayé les déclarations des contestataires. Sa majesté Samuel Elongo Kingue, sans aucun protocole, s’est ouvert à nous.
Sa Majesté, il y a beaucoup de bruits à Bwadibo. On a vu un groupe de personnes ont marché en insinuant que vous avez volé les terres. On veut savoir ce qui se passe dans le village….
Il y a des grandes personnes qui se font manipuler comme des enfants par des gens tapis dans l’ombre et surtout bien organiser pour me faire la peau. En fait, il y a un problème de désinformation, il y a même l’incompréhension. Si je prends l’exemple du terrain dont ils parlent trop, il y a la famille Gabsia qui nous a rétrocédé 22 hectares. Maintenant, je ne sais par quel canal, ceux qui marchent ont appris que c’est plutôt 32 hectares et que j’ai déclaré 22. Pourtant quand on m’a remis ces 22 hectares, j’ai déposé tous les papiers devant tous les fils de Bwadibo et à l’Eglise où le partage a été accepté à l’unanimité. Aujourd’hui, je m’étonne qu’ils soient en train de parler de 32 hectares. C’est une diffamation très grave. Il y a des papiers. Il y a le titre foncier qui est chez Maitre Toumou. Tout est clair. Dans ces espaces même, Il y a beaucoup d’entre eux qui ont déjà vendu leurs parts. D’autres ont construit des maisons, d’autres ont dilapidé leur argent comme ça. Ce sont ces gens-là qui reviennent à la charge aujourd’hui pour m’insulter publiquement.
Je me bats pour le village Bwadibo, pour obtenir ne serait-ce que des parcelles de terrain, parce que nos grands-parents ont tout vendu, pour dire la vérité. Mais je me bats quand même que les petits qui viennent derrière aient au moins les petits espaces pour construire leurs maisons aussi. Il y a l’autre qui a parlé du problème de carrière. Peut-être qu’il ne maîtrise pas, je ne sais pas ce qu’il veut celui-là. Il ne maîtrise pas les choses de la carrière. Il ne sait pas qu’on ne peut pas exploiter une carrière sans autorisation. Donc, l’exploitation de cette carrière m’a été autorisée par la délégation régionale des mines et des industries pour le Littoral. Et quand on vous autorise, il faut nécessairement déclarer tous les mois, c’est-à-dire le peu d’argent que la carrière produit, il faut déclarer ça tous les mois.
Et quand vous déclarez, vous êtes obligé d’aller payer aux impôts. J’ai fait les efforts, j’ai appelé la notabilité, ils sont eux-mêmes descendus à la carrière et sept lots ont été confiés à chaque famille qui perçoit son argent contre des charges. Maintenant je ne sais pas ce qu’ils réclament. La carrière est là pour aider parce que la mairie de Dibombari ne fait rien à Bwadibo. Regardez les routes de Bwadibo. Si je me mets à dilapider le peu d’argent qui reste là, on n’aura même pas où passer. La carrière aide tout le monde au village. Pour revenir au problème du marché dont on m’accuse de prélever de l’argent. Vraiment je ne sais pas d’où sort ce genre de racontage-là. Vous êtes des journalistes aller faire vos investigations. Je n’ai jamais mis mes pieds dans ce genre de registre-là. Ce sont les affirmations portées par mes jeunes frères, juste pour me nuire et détruire le village. Mais je ne vais jamais accepter que les jeunes gars qui sont manipulés détruisent Bwadibo. Ce n’est pas possible. Je bagarre contre des intrus qui viennent récupérer le terrain facilement comme ça à Bwadibo.
D’autres le savent. Je suis même poursuivi devant les tribunaux par certaines personnes à Douala par rapport au terrain de Bwadibo, ils le savent. Mais quand je suis dans cette bagarre, personne ne vient à mon secours. Ce n’est que quelques filles dans la notabilité qui viennent à mon aide. Mais, cela ne m’empêche pas de distribuer les espaces conquis de haute lutte à toute la population. Et puis, Bwadibo n’est pas seulement une affaire des autochtones. Bwadibo, c’est tout le monde qui doit en bénéficier. Ils m’ont diffamé. J’aurai besoin qu’ils viennent devant les autorités, prouver comment je suis voleur. Ils viendront prouver comment j’ai volé les terrains qui nous appartiennent tous.
Est-ce que Bwadibo va être en paix un jour, dans ce contexte-là ?
Si on ne s’explique pas devant les autorités, Bwadibo ne serait pas en paix. De toutes les façons, pour les diffamations, il faut que ces gens-là apportent toutes les preuves de leurs déclarations faites dans les médias. Je dis, je répète, si on ne s’explique pas devant les autorités judiciaires et administratives, Bwadibo ne va pas être en paix. Parce que quand vous voulez parler de quelque chose, rassurez-vous d’avoir les documents, d’être capable de pouvoir apporter les preuves de vos propos repris par les journalistes. Parce que ça court. Les médias, c’est partout dans le monde entier.
Majesté, on a vu des attestations signées en votre nom
Oui, justement. Parmi ces jeunes qui font ses manifestations, il y a deux ou trois qui font des attestations à mon nom. Vous voyez jusqu’où ils peuvent aller ? Ils délivrent des documents en mon nom en posant ma signature, qu’ils ont au préalable, scannée.
Vous voyez jusqu’où se trouve le banditisme des jeunes ici à Bwadibo? Mais ce n’est pas possible. On ne peut pas falsifier, scanner la signature d’un chef. Ils mettent les noms des personnes qui n’ont jamais été notables. Et mon nom en premier. Il faut qu’on s’explique.
Je dois porter cette affaire devant les autorités.
Entretien mené par Alphonse Jène
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