Arrivée à la CAN avec trop de tralalas, l’équipe marocaine est sortie de la compétition par l’Egypte en quarts de finale, emportant avec eux leur mépris et suffisance.
Le Maroc a été battu dimanche 30 janvier dernier en quarts de finale de la Coupe d’Afrique des Nations(CAN), un but contre deux, par les pharaons d’Egypte. Une défaite, suite à laquelle, il a été éliminé de la compétition.
Cette débâcle des Lions de l’Atlas difficilement digérée face aux égyptiens est venue remettre au goût du jour le comportement des dirigeants de l’équipe marocaine, ainsi que celui des autorités de ce pays à l’endroit d’autres états et les populations africaines.
Ce pays du Nord de l’Afrique a été longtemps reproché de jouer contre le continent auquel il appartient et de se positionner en félon.
Avec l’actualité autour de la Coupe d’Afrique des Nations de football 2021 qui se joue actuellement au Cameroun précédée des rumeurs d’un éventuel report demandé par la Fifa, ces accusations se sont davantage confirmées.
Attitude dissidente
En effet, trois pays du continent et le Maroc en tête ont été épinglés d’avoir apporté leur caution au projet de report de la CAN suggéré par Gianni Infantino, président de la Fifa au cours du comité exécutif de cette instance faitière du football qui a eu lieu au mois de décembre 2021 à Doha au Qatar. Les raisons de cette demande d’ajournement évoquées par le patron du football mondial et à laquelle a adhérée le royaume chérifien, ont été, l’incertitude sur les infrastructures camerounaises, la dégradation de la situation sanitaire dans le monde avec l’émergence du variant Omicron en Afrique australe et la réticence des clubs européens, plus principalement anglais, à libérer leurs joueurs en hiver.
Cette attitude du Maroc jugée dissidente a été décriée non seulement par une grande partie de l’opinion africaine mais beaucoup plus par les dirigeants camerounais dont on sait les sacrifices que leur pays a consentis pour organiser cette compétition. Beaucoup ont évoqué un manque de solidarité entre africains et de surcroît à l’endroit d’un autre pays du continent.
Roger Milla, ancien Lion Indomptable et légende du football africain n’est pas allé du dos de la cuillère pour tancer le comportement des marocains et d’autres pays, notamment ceux du Nord de l’Afrique, soupçonnés être derrière cette idée de renvoi. « Ce sont les pays magrébins qui mettent toujours le bordel dans notre football. Ils ont toujours évolué sur le continent africain. Et nous les avons d’ailleurs acceptés mais je ne vois pas pour quelle raison ils continuent de mal parler des autres pays et de l’Afrique. Ce n’est pas normal. S’ils ne sont pas africains, qu’ils aillent jouer pour l’Europe, l’Asie ou bien pour d’autres mais qu’ils ne viennent pas mettre le désordre dans notre continent », a déclaré d’un ton assez remonté le joueur africain du siècle.
Ancien pays colonisé, devenu colonialiste
Le Maroc, dans ces agissements, n’est pas à son premier coup. En 2015, alors que ce pays devrait abriter la 30ème édition de la CAN, il désiste à la dernière minute, mettant en avant l’épidémie d’Ebola dont il était très loin des zones de contamination circonscrites dans trois pays bien distincts en Afrique (Guinée, Libéria, Rdc). Une décision subite qui a obligé Issa Hayatou, l’ancien président de la Caf à mettre tous les moyens en œuvre pour sauver de justesse cette édition de la CAN qui a été finalement abritée par la Guinée Equatoriale.
Ce comportement déloyal des dirigeants marocains doublé d’une attitude quelque peu condescendante vis-à-vis d’autres pays africains ne date pas d’aujourd’hui.
En 1984, l’Organisation de l’unité africaine admet la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD) comme membre à part entière de l’organisation panafricaine, le Maroc proteste et claque la porte de cette institution. Ce pays a continué à annexer jusqu’à ce jour illégalement la RSAD avec l’aval des Etats-Unis et certaines puissances occidentales au mépris du droit international. Paradoxal pour un ancien pays colonisé, qui est resté lui-même fondamentalement colonialiste malgré la fin des expansions décrétée par ceux-là même qui les ont mis sur pied.
Contrarié, le Maroc, qui s’estime plus proche de l’Europe que de l’Afrique, cette même année, sollicite son adhésion comme membre de l’Union européenne. Sauf que les dirigeants marocains se sont trompés sur la nature de cette union, assise plus sur les bases culturelles qu’économiques. Leur candidature est rejetée en 1987 par le Conseil européen. La raison donnée à ce rejet est sa non-appartenance géographique au continent européen.
Rejet de l’Africanité
Cette façon courtoise des européens d’éconduire leurs voisins méditerranéens est en même temps un refus d’intégrer un intrus dans un espace essentiellement judéo-chrétien.
Ce rejet de l’africanité du Maroc enfoui dans le comportement des populations blanches de ce pays remonte à un passé assez lointain.
Depuis le XVIe siècle, des dynasties marocaines ont associé la blancheur de la peau à la légitimité politique et à la liberté.
Les Haratine, terme utilisé pour désigner les Maures noirs, jugées dociles et serviables, ont été soumis à l’esclavage pendant le règne du sultan Moulay Ismaïl au XVIIe siècle. Cet asservissement de longue durée a marqué l’histoire marocaine et a façonné le devenir des relations raciales futures et le comportement à l’égard du noir. Le mépris racial continue donc jusqu’aujourd’hui à l’égard des Haratine et des Noirs en général dans ce pays.
On peut l’observer par la place réservée à cette population dans la société marocaine. Si certains Noirs ont pu intégrer avec de grands efforts les couches sociales élevées et exercer toutes sortes de professions à ce jour, la grande majorité reste encore marginalisée. Les mariages mixtes entre Arabes et Noirs sont encore perçus comme un tabou social et honteux dans certaines régions du Maroc. Avons-nous vu un seul noir occupé un poste important dans le gouvernement du Maroc, pays comptant pourtant en son sein de nombreux noirs ?
Si Roger Milla a eu le courage d’aborder le sujet, c’est parce qu’il a eu à côtoyer les dirigeants de ce pays au plus haut niveau et en a fait le constat. Il n’a donc fait que dire tout haut ce que beaucoup pense tout bas. L’ancienne gloire de football camerounais dans ses propos que d’aucuns peuvent juger d’excessifs, a permis néanmoins de poser le problème du comportement de certains Etats se trouvant en Afrique mais qui en réalité, dans leur perception, n’en font pas partie.
Chien de garde de la forteresse
Le Maroc n’est-il pas l’un des pays africains qui a ouvert son espace aérien et servi de bases aux forces de l’Otan pour bombarder et détruire la Lybie ?
D’autre part, dans son rôle Chien de garde de la forteresse, le Maroc est également dénoncé de traitement inhumain à l’endroit des passagers noirs en transit dans les aéroports marocains et des migrants venus d’Afrique subsaharienne. Ces voyageurs, bien qu’étant en règle sont parfois retenus des heures durant en contradiction aux règles, attendant assis très souvent à même le sol, pour vérification de leurs documents pendant que leurs homologues blancs traversent normalement les contrôles sans aucune inquiétude. Ces images sont devenues tellement banales dans les aéroports de ce pays au point où beaucoup ne s’en rendent même plus compte.
On peut de la même manière s’inquiéter de la brutalité exercée par la police de frontière marocaine sur les migrants refoulés par les Espagnols de l’enclave de Ceuta et Melilla si ceux-ci ne sont pas déportés par centaines dans le désert du Sahara aux frontières algériennes et mauritaniennes parfois sans eau, nourriture, ni assistance humanitaire.
Plusieurs exportateurs de vivres africains en Europe disent rencontrer un refus catégoriques des autorités marocaines à obtenir l’autorisation pour faire entrer leurs marchandises dans ce pays malgré la forte demande des populations subsaharienne y vivant. Les autorités marocaines évoquent le risque de contamination de leurs populations. Charles Tunda, exportateur de nationalité congolaise et patron de l’entreprise Tunda Exotic installé au Cameroun, en a essuyé plusieurs fois le refus. « Nous avons tout essayé en vain. Pourtant, les produits marocains, eux, sont déversés en quantité dans la partie subsaharienne africaine sans aucun procès», indique-t-il.
Mépris et racisme
Ces agissements qui relèvent du mépris et du pur racisme expliquent le comportement de la délégation marocaine à la CAN arrivée avec des tonnes de matériels dont matelas et draps, congédiant en même temps le personnel de l’hôtel qui les accueillait pour le remplacer par celui venu du royaume.
Fouzi Lekjja, président de la fédération marocaine de Football à la tête de cette délégation a mis en avant le covid pour justifier ce fort déploiement. Un argument peu convaincant de cet officiel marocain, surtout quand on sait que malgré toutes ces dispositions soi-disant protectrices, l’équipe du Maroc n’a pas échappé au covid. Deux cas ont été déclarés en son sein avant les quarts de finale.
L’image véhiculée par les marocains à travers leur attitude est celle du noir impur. Par conséquent, celui dont tout ce qui en vient est forcément souillé. Ce qui explique le grand nettoyage supplémentaire de l’hôtel en plus de celui déjà effectué avant leur arrivée par leurs équipes d’hygiène ramenées directement de leurs pays. Un manque de confiance et une insulte à l’endroit du pays hôte.
Malheureusement pour eux, ce sentiment de supériorité affiché à l’endroit d’autres Etats africains, n’a pas rejaillit sur leurs performances sportives. La race n’étant en aucun cas un élément de réussite et de compétence.
Grenouille plus grosse que le bœuf ?
Le succès, nous le savons, est reposé sur deux piliers qui sont le travail et l’organisation. Nous connaissons les progrès économiques faits par le Maroc ces dernières années sur le plan économique qui lui donne une position de poids en Afrique. Cela ne signifie pour autant pas que ce pays est devenu la première puissance en Afrique au point de narguer et de regarder les autres les nations sur le continent de haut. La grenouille a-t-elle voulu se faire plus grosse que le Bœuf ?
Et même, quand un des enfants d’une grande famille a « évolué », doit-il mépriser les autres ou a-t-il pour devoir de tirer ses frères à son niveau ? Cette volonté du Maroc à vouloir jouer seul et ne songer qu’à lui au détriment du continent tout entier est une erreur de stratégie. Car elle ne permet, non seulement pas à l’Afrique d’avancer mais donne plutôt l’occasion aux grandes puissances de la soumettre d’avantage. Toute « puissance » est faible si elle n’est pas unie aux autres. En plus, pourquoi l’Afrique devrait-elle toujours s’aligner au reste du monde et non de chercher sa propre voie alors qu’elle n’a pas les mêmes impératifs que les autres parties du monde ?
Le projet d’une coupe du monde tous les deux ans soutenu par le président de la fédération marocaine de football est une pure hérésie. Vu qu’il y a risque en adoptant cette nouvelle formule, non seulement, de tuer la coupe d’Afrique des nations dont beaucoup de pays s’en servent pour développer leurs infrastructures mais en même temps d’enlever le caractère épicé à la Coupe du Monde attendu vivement tous les quatre ans par de nombreux professionnels de Football comme une consécration.
Se débarrasser des clichés
Toutes les nations ont certes des raisons présentes, passées ou futures pour se sentir incomparables, elles doivent cependant se projeter dans le futur et refuser de s’engluer dans un passé peu glorieux qui n’honore pas la race humaine. C’est pourquoi, nous nous interrogeons également sur l’attitude de la plupart des Etats africains au Sud du Sahara, plongés dans une certaine insouciance quant à leur devenir et celui de leur peuple, qui ne sont pas dans une posture, même dans leurs façons d’appréhender les choses, à imposer du respect et amener les autres Etats à avoir des égards pour leurs concitoyens pour qu’ils ne soient plus l’objet de mépris à travers le monde. Car, dans ce monde capitaliste d’aujourd’hui, il n’y a pas de place pour les pauvres. Ensuite, l’indigence nulle part, n’attire de respect.
Les échanges commerciaux entre le Maroc et l’Afrique subsaharienne s’élèvent aujourd’hui à 16,3 milliards de dirhams marocains, l’équivalent 1009,948 milliards de francs Cfa depuis que ce pays a décidé de renouer avec la grande famille africaine en réintégrant en 2017 l’Union Africaine.
Ces chiffres seuls suffisent pour montrer aux dirigeants marocains que les africains sont des partenaires de choix. Mais doit-on mépriser autant ceux qui vous font gagner autant d’argent ?
Si Mohamed VI, le roi du Maroc, s’est résolument décidé de se rapprocher de l’Afrique en signant des contrats de partenariat avec plusieurs pays dans le sud du Sahara, c’est parce qu’il a compris que le destin du Maroc et ces pays est incontestablement lié.
Cette démarche, pour qu’elle soit sincère aux yeux des africains, doit être suivie cependant d’un travail de fond. Celui d’évacuer de la tête des autorités marocaines et les populations de ce pays des perceptions négatives enfouies dans leur cerveau à l’égard des peuples africains avec lesquels ils veulent coopérer. Un impératif, pour ce pays, car les clichés demeurent assez tenaces dans la mémoire de la plupart de nos frères marocains ainsi que certains Nord africains qui ne sont pas prêts à s’en séparer.
En attendant, ils peuvent repartir avec leurs draps et matelas usés, ainsi que leur reste de nourriture qu’ils étaient supposés dans leur posture de maître laisser à leurs esclaves. Juste une simple logique.
Félix EPEE.
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